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Photo du rédacteurDaniel Shoushi

Se nourrir du Prana


Nicolas de Flüe, se nourrir de prana.

Nicolas de Flüe (XVème siècle), un inédie avéré


I/ De la science à la métaphysique


Nous allons aborder un sujet des plus brulants dans cet article, en effet, le regard que portent les biologistes sur la réalité de cette notion tend à être dénigré avant même d'établir un protocole de validation. L'inédie, le respirationisme ou encore se nourrir de Prana désigne sous plusieurs termes un champ d'application dans lequel une personne s'abstiendrait totalement de nourriture et de boisson. Cette personne est censée vivre sans se nourrir pendant plusieurs semaines, mois ou années. C'est une chose impensable en biologie puisque le corps humain est perçu comme une machine, comme tout corps vivant, il lui faut donc de l'énergie afin qu'il puisse fonctionner et se mouvoir correctement. Cette énergie est ingurgitée grâce aux aliments que l'on avale ainsi qu'aux différents liquides que nous buvons. Si l'on prive le corps humain d'énergie, le corps de la personne se détériorera, s'affaiblira et puis mourra. Cette vision du corps-machine ne peut exister que dans un système de représentation dans lequel chaque être vivant agirait comme un automate, la conscience qui activerait le corps est donc perçue comme un ensemble de sécrétion moléculaire dû à l'activité neuronale, et, que, par conséquent, toute conscience est de nature organique et disparaitrait avec ce dernier. Une telle représentation se fonde également dans un système clôt, autrement dit chaque conscience aurait besoin d'apport énergétique extérieur, en outre la nourriture que nous ingurgitons, afin que la machinerie organique puisse se mettre en marche. Le corps-machine-moléculaire s'applique à démontrer que l'ensemble des activités biologiques s'appuie sur les mêmes principes que la thermodynamique élaborée par les ingénieurs et les physiciens du XIXème siècle. Nous allons donc nous attarder sur la thermodynamique pour mieux revenir à notre sujet.


La thermodynamique du XIXème siècle se définit comme la science de l'équilibre dont la teneur et l'aboutissement n'existent que dans un milieu fermé, c'est-à-dire que les deux premières lois qui en découlent doivent s'entendre dans un système clôt. Le fondement même de la thermodynamique est l'énergie, mais qu'est-ce que l'énergie? Le mot énergie vient du grec energeia qui signifie "force en action" c’est-à-dire capacité à produire un mouvement. Ainsi un corps qui possède de l’énergie cinétique peut continuer, de lui-même, son mouvement au moins sur une certaine distance même dans un milieu résistant. Pour un système en état d'équilibre où les variables d'état sont constantes et uniformes, donc statique, l'énergie interne du sytème est une fonction de celles-ci.


Qu'elles sont les deux premières lois de la thermodynamique?


La première loi de la thermodynamique est la loi de la conservation de l’énergie. Elle stipule que l'énergie d’un système ne change pas peu importe les évolutions que subit ce système. Cette loi est un fondement de la logique scientifique et permet à prédire la direction que prendra un système. Le deuxième principe de la thermodynamique stipule que le désordre dans tout système isolé croît inévitablement et irréversiblement avec le temps. Il explique pourquoi il faut se nourrir régulièrement, faire le plein d’essence à chaque fois pour rouler, pourquoi une boisson chaude se refroidit, ou encore pourquoi le temps s'écoule dans une direction et non dans l'autre, et pourquoi toute forme d'organisation meurt un jour. Tout comme pour la première loi, on n'échappe pas à la deuxième. La création spontanée d'énergie n'existe pas.


A partir des connaissances des lois de la thermodynamique en état d'équilibre, statique et fermé, la biologie moléculaire s'est inscrite dans cette représentation afin d'élaborer son homme-machine. Nous pouvons également nous apercevoir que la physique d'Aristote est à la source de cette représentation de la matière. En effet, le philosophe Aristote a construit un univers dans lequel chaque élément qui le constitue ne peut se mouvoir qu'à condition qu'un élément premier impulse la machinerie cosmique, ce qui implique un Moteur immobile propulsant les éléments constitutifs de la matière. Le Moteur immobile ("Celui qui bouge sans être mû" dans les textes d'Aristote) est définit comme la Cause première (Prima causa), et se tient hors de porté de l'espace-temps et de la matière. Le Moteur immobile fait mouvoir les autres éléments sans être lui-même mû par une action initiale. Bien que la biologie actuelle rejette toute idée d'un Principe transcendant, le corps humain découle bien de cette représentation aristotélicienne du mouvement. Ce qui n'est pas dit, et ce qui reste une énigme en biologie, c'est l'origine même de l'organisation structurelle des organismes vivants. Pour quelle raison l'ordre se manifeste et qu'il y a constance de l'organisation structurelle d'un organisme vivant? Les chimistes et les physiologistes sont au coeur d'une bataille car ni l'une ni l'autre branche de la biologie ne sait répondre à cette question. Aristote aurait répondu par une évidence, c'est grâce au Moteur immobile. Par conséquent, la préservation de l'ordre d'un organisme durant toute une vie reste une interrogation actuelle en biologie. Il nous faut ajouter qu'à côté de cet homme-machine s'élabora en biologie un homme-moléculaire-chimique dans lequel toutes les interactions organiques dépendent d'une physique aristotélicienne, une molécule en active une autre et ainsi de suite. En conséquence, la perception qu'ont les biologistes de l'énergie découle d'une compréhension aristéto-newtonienne du corps en mouvement sans que cette branche de la science n'est pu intégrer le bouleversement qu'apporta Albert Einstein, ni même la physique quantique du XXème siècle. Notre biologie moléculaire de notre époque est donc prisonnière du corps-machine-chimique datant de Newton (XVIIIème siècle), car la physique de Newton s'ancre dans la physique d'Aristote.

Suite à cette explication, il nous faut entrevoir que le XIXème siècle à engendrer également deux matières qui restent actuellement inconciliable en science. D'une part les physiciens s'occupent d'une matière dite inerte et d'autre part les biologistes s'accaparent une matière dite organique, la différence entre les deux matières est que l'une est morte et statique, objet des expériences physiques, tandis que l'autre est vivante, matière constitutive des êtres vivants. Toute la question de l'origine de la vie tient entre ces deux matières, puisque il est annoncé que notre univers découle d'une matière inerte, morte et statique, dans lequel fut injecté de l'énergie depuis la Singularité Initiale du Big Bang, et de l'autre existe des corps-machine-chimique s'activant dans une matière vivante et dont l'énergie du mouvement est rendu possible par l'ingestion d'aliment. Les prédictions de l'avenir de l'univers et des corps vivants dépendent donc des lois de la thermodynamique, l'énergie tend vers une direction prédéfinit par ces mêmes lois. En conclusion, dans cette représentation du monde et de l'homme il est impossible de se nourrir de Prana, d'ailleurs le Prana reste une fantasmagorie.


La révolution de cet univers plat, statique, et sans apport énergétique proviendra des nouvelle découvertes sur la thermodynamique d'Ilya Prigogine. Ce chimiste et physicien du XXème siècle poursuivit les travaux du XIXème siècle et mit en place des études en système ouvert et dynamique des fluctuations de l'énergie, et dans lequel des structures dissipatives se mettaient en mouvement. Ce sont des structures stationnaires hors d’équilibre où la dissipation d’énergie entretient une organisation locale, c'est la naissance de l'auto-organisation et des propriétés émergeantes. Toutes ces études soulignèrent l’importance des rétroactions, des non-linéarités et du caractère ouvert et hors d’équilibre des systèmes pour qu’il y apparaisse des formes stables et reproductibles sans plan d’ensemble, ni prescription extérieure. Désormais, il faut penser l'ordre et l'organisation comme une mise en mouvement d'une énergie en apport constant, qui agirait en système ouvert et dynamique, et qui produirait des auto-organisations. Tout système découle d'une certaine relation entre ses éléments et produirait une organisation singulière dont l'état d'équilibre dépendrait de l'apport constant d'énergie. L'équilibre résulterait d'une distribution non linéaire de l'énergie, dès lors ce ne sont plus les éléments du système qui importe le plus mais c'est la relation qu'ils tissent qui prime. Si l'énergie change en intensité, la relation entre les éléments du sytème s'en trouverait bousculé et l'organisation se transformerait. Dans ce système ouvert, il existe un seuil de tolérance où l'organisation d'un système est préservée jusqu'à un certain apport d'énergie. Si l'énergie dépasse le seuil, alors c'est l'ensemble du système qui s'en trouve bouleversé.


Toute la compréhension de notre questionnement initiale se tient en fait dans cette énergie et de son apport dans un système. Il est donc capital d'en comprendre toutes ses attaches scientifiques. Nous resterons dans les grandes lignes puisque ce sujet demanderait à lui tout seul une étude approfondie, ce qui ne peut être fait dans cet article.


Nous entrevoyons dans l'énergie non seulement cette énergie palpable et tangible, mesurable, bien que ce soit une notion parfaitement abstraite, mais aussi une énergie impalpable dont cette même énergie sensible en serait la part émergente. Il en est de même pour l'ensemble des observations physiques et biologiques de la matière, toute notre science tient de l'observation et du mesurable, en conséquence tout immesurable apparait comme du fantasmagorique. Tel est le problème du Prana, il est non mesurable et donc non scientifique. Avant de se lancer dans cette étude, il nous faut au préalable dire que la matière est une et que la représentation de deux matières est une illusion et une construction de l'esprit. Dans cette représentation, la matière inerte ne se meut pas et n'est pas doté de vie, le caillou par exemple nous apparait comme statique. Or, nous savons qu'en fait la matière n'existe pas, tel est le propos des physiciens, mais qu'elle est sujette aux ondes électromagnétiques et aux ondes de fréquences. La matière est en elle-même une propriété émergeante, c'est de l'énergie dynamique qui a prit une certaine forme selon l'agencement, et les relations, que prennent les éléments constitufs de la matière. Les biologistes sont à nouveau restés bloqués à l'époque de Newton, il n'ont pas intégré cette notion physique. Inclure cette vision en biologie demanderait d'une part de regarder le corps humain comme un ensemble d'éléments dont l'agencement, l'organisation et l'ordre résulteraient d'un système ouvert et ancré dans une physique quantique, et d'autre part que le corps humain soit en lui-même une fluctuation d'énergie quantique et donc résulterait d'ondulation électromagnétique. Il y a un continuum dans la matière où le principe d'auto-organisation serait adjacent, ainsi que toutes les propriétés émergentes. Dans cette vision du monde, la seule chose qui existe c'est l'esprit.


L'esprit est ce qui meut la matière, et cette dernière dépendrait de l'intensité énergétique qu'il produirait. Nous sommes en pleine métaphysique, pourtant la physique actuelle flirt avec cette discipline car les physiciens sont en train de découvrir ce qui fut énoncés par les grands mystiques du monde, la seule chose qui est vraiment c'est l'esprit. Défendre cette idée en biologie serait une hérésie, alors que cette discipline n'a pas encore intégré la physique du XXème siècle au coeur de sa démarche. Dans l'optique où l'esprit est et la matière en serait la part active, le Prana se présenterait comme le premier élan de l'énergie de l'esprit, son intensité serait telle qu'elle échapperait à toute mesure, néanmoins l'énergie électromagnétique surviendrait comme densification de l'énergie pranique. A l'image de la lumière qui se diffracte en différente couleur contenant une certaine intensité de chaleur électromagnétique, l'énergie pranique se densifierait et apparaitrait sous les différentes interactions que nous connaissons de l'énergie mesurable. L'intensité serait donc la clé de compréhension du Prana. Toute la densité de la matière, sa masse, son énergie, sa texture, son ondulation et ses fréquences surgiraient depuis le Prana, connue également dans certains textes sanskrits sous le nom de Lumière infinie. Cela nous incite à penser que la vitesse de la lumière ne soit pas une célérité constante et indépassable, la lumière physique serait également une part tangible d'une lumière intangible, c'est ce que nous entendons derrière le terme la Lumière infinie. Il existe des couches de densité de matière allant du plus subtile au plus dense, d'une incommensurable et immesurable matière à sa descente progressive dans un espace plus tangible. Nous notons que le temps dépend de la mesure de la lumière, et que la lumière est énergie, ce qui indique que l'esprit est du temps pur dont la nature énergétique est de nature quantique. L'esprit, c'est du temps, c'est de la lumière, c'est de l'énergie selon un certain ordre d'émergence de la matière, mais c'est en fait de l'Eternité qui ralentit sa course afin de se dévoiler sous une certaine forme et densité matérielle. L'espace est une qualité du temps et la matière est un substrat de l'esprit. Grâce à cette vision, nous avons les outils explicatifs du pouvoir de l'esprit sur la matière, mais également une explication sur la nature de l'esprit humain.


C'est pourquoi, se nourrir de Prana est tout à fait envisageable dans une perspective biologique non réductrice et adogmatique comme nous le présentons. L'esprit humain reviendrait vers une énergie qui lui propre, l'énergie pranique. Il est a noté que notre corps soit un organisme électromagnétique qui émet des photons, en effet, nos cellules résonnent et vibrent dans un dialogue intracellulaire puis communiquent dans un langage biophotonique comme nous l'ont montré les études menées par le savant allemand Fritz-Albert Popp. Fritz-Albert Popp est biophysicien, il pense que les biophotons commandent l’action des hormones, des enzymes et de nombreuses autres substances présentes dans la cellule, nous sommes à nouveau en présence d'une densification de l'énergie pranique par laquelle transite d'abord la lumière, via les cellules biophotoniques, puis les substance mesurables chimiquement. Donc, toute modification de l'esprit, c'est-à-dire de notre état de conscience, affecterait l'ensemble de toutes les interactions physiologiques détectables par les instruments de mesures. Les phénomènes de miracles et des facultés Psy (paranormales et parapsychologiques) s'expliqueraient par ce processus vertical de la conscience en lien avec son intensité énergétique. Plus la conscience retournerait à sa propre source incommensurable, plus elle en dégagerait de l'énergie et donc aurait la capacité de modifier la matière. Tout est une question d'intensité. Lorsque la conscience s'approche de l'énergie pranique et de la Lumière infinie, elle en tirerait assez de force pour modifier la matière, son corps, ce que nous nommons communément miracle, et moins nous y arrivons, moins nous avons la capacité d'interagir consciemment avec la matière. Aux échelles intermédiaires, la conscience développerait les facultés Psy, qui serait une désinhibition progressive de facultés latentes. Dans ce schéma de conscience, le rapport psyché / soma, ou âme et corps, se joigne pour former une entité unique, une psychophysique. Il y a accointance entre la psyché et le soma de la même manière que l'électricité s'articule avec le magnétisme. En fait, la psyché est une liaison qui se coordonne avec le soma, ce qui touche l'un modifie l'autre, l'ensemble dévoile un système dynamique et ouvert sur le monde quantique dont la conscience individuelle serait une apparition visible d'une entité de nature quantique.


A ces derniers mots théoriques, abordons les témoignes historiques rapportés par diverses sources occidentales sur l'inédie.


II/ Témoignages de mystiques chrétiens


Nous allons prendre à témoins quelques saintes chrétiennes afin de démontrer que l'inédie dépasse les frontières asiatiques, et qu'en Occident, il existe bel et bien une tradition à ce sujet.


Marie d'Oignies (XII-XIIIème siècle) :

Marie se retire dans un ermitage du prieuré Saint Nicolas d'Oignies, près de Namur. Des disciples se rassemblent autour d'elle. Parmi eux, le fameux Jacques de Vitry, il sera son futur biographe. Tout en pratiquant une ascèse digne des Pères du Désert, elle éprouve des extases mystiques et des visions évangéliques. Marie sert ses compagnons et continue de soigner les lépreux. Voici un témoigne de sa vie par Jacques de Vitry:


"Pendant sa maladie, elle ne pouvait absolument rien prendre, elle ne pouvait même pas supporter l'odeur du pain ; malgré cela, elle recevait le Corps de Notre-Seigneur sans aucune difficulté. Et ceci, se dissolvant et passant dans son âme,non seulement réconfortait son esprit mais soulageait tout de suite sa faiblesse corporelle. Deux fois, pendant sa maladie, en recevant l'hostie consacrée son visage fut illuminé de rayons de lumière. Nous avons un jour essayé de lui faire prendre une parcelle non consacrée, mais elle se détourna à l'instant, ayant en horreur l'odeur du pain. Un petit morceau avait touché ses dents : la peine et le malaise furent si grands qu'elle commença à pousser des cris, à vomir et à cracher, à haleter et à sangloter comme si sa poitrine allait éclater. Elle continua ainsi à pleurer un long moment, et bien qu'elle se rinçât la bouche avec de l'eau mainte et mainte fois, elle ne put guère dormir de toute la nuit. Si infirme de corps qu'elle fût, si faible et épuisée que fût sa tête, car au cours des cinquante-trois jours précédant sa mort, elle ne prit absolument rien, elle put toujours supporter la lumière du soleil, et ne ferma jamais les yeux pour se défendre de son éclat et de sa splendeur."


Angèle de Foligno (XII-XIIIème siècle) :

Moins elle mange, plus elle se sent proche de Dieu. C'est ainsi qu'elle se priva durant douze années de nourriture, la simple vue de la Sainte ostie lui fournit toute la nourriture dont elle avait besoin. Un extrait de son ouvrage Le livre des visions et instructions :


"C'était pendant le carême ; j'étais sèche et sans amour. Je priais Dieu de me donner quelque chose de lui-même ; car, moi, je n'avais rien. Les yeux intérieurs furent ouverts en moi, et je vis l'amour qui venait à moi. Je vis son principe, mais non sa fin. Ce que je voyais avait un prolongement, sans avoir de limite. Les couleurs ne me fourniraient aucun terme de comparaison.


Quand l'amour arriva à moi, je le vis avec les yeux de l'âme beaucoup plus clairement que je n'ai jamais rien vu avec les yeux du corps. Je dirai, si vous voulez, que l'amour prit, en me touchant, la ressemblance d'une faux. Je vous supplie de ne pas croire qu'il s'agisse d'une ressemblance commensurable. Mais il me sembla qu'un instrument tranchant me touchait, puis il se retirait, ne pénétrant pas autant qu'il se laissait entrevoir. Je fus remplie d'amour ; je fus rassasiée d'une plénitude inestimable. Mais écoutez le secret : cette satiété engendrait une faim inexprimable, et mes membres se brisaient et se rompaient de désir, et je languissais, je languissais, je languissais vers ce qui est au delà. Ni voir, ni entendre, ni sentir la créature. Oh ! silence ! silence


Élisabeth Achler (XIV-XVème siècle) :


Konrad Kügelin, son biographe, affirme que que parvenue à une contrition entière, il lui fut ordonné par une inspiration du Saint-Esprit de ne plus prendre aucune nourriture corporelle. C'est ainsi qu'elle s'abstint de nourriture durant douze années. Son biographe témoigne :


"Une fois, durant le carême, immobilisée sur sa couche à cause de ses stigmates, elle reçoit de sa prieure l'ordre de manger un peu de bouillie de gruau : elle la rejette au prix de malaises si graves qu'elle est bientôt à toute extrémité."


Catherine de Gênes (XV-XVIème siècle) :


Ses biographes, ses proches, témoignes de sa vie particulièrement extraordinaire, nous pouvons y lire :


"Pendant les premiers temps de ce jeûne prodigieux, Catherine craignit que l'excessive répugnance qu'elle éprouvait pour les aliments ne fût une illusion produite par Satan. Elle continua donc à s'asseoir tous les jours à la table commune, et elle fit des efforts inouïs pour manger. Mais aussitôt que, surmontant son dégoût extrême, elle avait avalé quelque chose, son estomac le rejetait avec d'inexprimables douleurs. Ses commensaux stupéfaits d'un phénomène aussi extraordinaire, eurent inutilement recours à tous les moyens qu'emploie la médecine en pareil cas; et ne sachant plus qu'imaginer, ils firent ordonner à Catherine, par son confesseur, de manger comme tout le monde. Elle obéit avec sa promptitude habituelle; mais, cette fois, le vomissement fut encore plus douloureux que les précédents, et la sainte sembla prête à rendre le dernier soupir.


Le confesseur, admirait l'opération divine, n'osa plus renouveler l'expérience. A partir de ce moment et pendant vingt-trois années consécutives, Catherine Adorne observa ce jeûne complet durant tous les carêmes et tous les avents. Jamais elle ne mangeait depuis le lundi de la Quinquagésime jusqu'au dimanche de Pâques, ni depuis la Saint-Martin jusqu'au jour de Noël; seulement elle prenait de loin en loin un verre d'eau mêlée de sel et de vinaigre, non point par goût ou par besoin, mais en mémoire de la boisson offerte au Sauveur crucifié."


Dans ces témoignages nous pouvons remarquer que le pouvoir de la conscience entre en jeu dans l'inédie de ces saintes, c'est-à-dire leur croyance. L'efficacité de ce jeûne tient donc aussi compte de la puissance de conviction de la personne, sans que cela soit un effet placebo, ou du moins l'effet placebo est la part active de la croyance. Ce que montre le placebo est en fait une capacité de la conscience à métaboliser sa croyance en une autre, et d'avoir un effet tangible sur le corps et la psyché. Encore une fois, la conscience domine la psychophysique et n'en est pas le produit. Est-il donc possible de se nourrir de Lumière? De ne vivre que du Prana? Nous en affirmons la possibilité, néanmoins il y a tout un rituel de préparation avant d'entamer une telle entreprise afin que la conscience et sa psychophysique puisse manifester cette puissance latente.


III/ Le Prana et l'Inde ancienne

Le grand indianiste André Padoux nous explicite dans ses ouvrages que la philosophie hindoue ne diffère pas des autres philosophies anciennes, de la Chine aux Aztecs, des peuples africains aux grandes civilisations nous découvrons une image similaire. L'Homme se tient au croisement du Ciel et de la Terre, entre ces deux pôles circulent une énergie subtile qui se densifie à mesure de sa descente. L'ancienne notion de Pneuma, que nous retrouvons dans la philosophie grecque est l'exact notion du Prana, tous deux signifient Souffle et s'apparentent au respire divin. Chez les sémites, c'est la notion du Rouach (langue hébraïque) et du Rouh (langue arabe) qui correspond à ce Prana, sans oublier le Chi / Qi dont l'ensemble de la sphère asiatique propose de voir cette énergie vitale qui circule partout autour de nous. En fin de compte, c'est notre société qui fait exception à la règle. Dans les textes sanskrits analysés par André Padoux, nous découvrons un rapport fort ancien entre l'Homme et le Cosmos. Il note au préambule ceci:


"Or cette classification place les constituants du psychisme humain, puis les organes humains d’aperception et d’action, les indriya, entre le plan divin et les éléments constitutifs du monde visible. Elle inclut donc implicitement l’être humain dans le procès cosmique."

Ce qui implique un lien physico-organique entre l'Homme et le Cosmos, nous sommes reliés à l'univers non seulement par notre psychophysique mais aussi par nos souffles énergétiques, ceux-là même qui donnent vie à notre psychophysique. La circulation du sang et des éléments nutritifs seraient donc reliés à ces souffles vitaux, connues dans la médecine grecque ancienne. Les notions de Pneuma et de Prana sont intimement liées au cycle de la respiration, et aux états mentaux qui en découlent. En fin de compte, lorsque nous évoquons la faculté de se nourrir de Prana, nous touchons en fait à d'antiques philosophies que notre société moderne s'est

chargée d'effacer. André Padoux écrit :


"Les systèmes tantriques ont également repris et développé la vieille conception des "souffles vitaux" (Prana), ou "vents" (vayu, vata), forces organiques animatrices de l’univers comme des humains, ce qui implique ces derniers dans le champ des forces cosmiques. Cette vision est renforcée dans le hathayoga tantrique, qui porte à dix, ou davantage, le nombre des Prana , les fait circuler dans tout le corps et même assimile au soleil et à la lune deux des principaux canaux où ils se meuvent. C’est à la notion de Prana que se rattache celle de kuṇḍalinī, cette force divine cosmique présente dans le corps, qui est si importante en contexte tantrique."


Pour les anciens médecins de l'antiquité dont la philosophie s'ancrait dans une spiritualité plus ou moins prononcée, le Prana est une force vitale qui a la pouvoir de réparer n'importe quel organe, et de soigner la psyché. Le principe d'auto-guérison est intimement lié à ce principe. Le Pneuma était localisé dans le coeur, lieu d'émergence de l'intelligence et de la vie, puis cette énergie vitale se distribuait partout dans le corps humain via un système de réseau.


Ce système de réseau, dont les canaux (nadis) hindous et les méridiens chinois correspondent parfaitement, permettait à son tour de faire circuler cette énergie vitale grâce à laquelle toutes les facultés psychiques et corporelles pouvaient fonctionner. Ce Pneuma est à l’origine de la notion d’esprit dans la culture occidentale ; l’esprit en tant que souffle de vie, ou l’esprit qui souffle dans la pensée. C'est ainsi que notre esprit, notre conscience, se tient à l'aube de la psychophysique et soutient toutes les activités qui s'y déroulent. Dans la médecine des anciens égyptiens, le cœur était le centre de nombreux metu ou canaux, en nombre variable, suivant les textes. L'air (équivalent Prana), le principe essentiel de la vie, le Pneuma des Grecs, était puisé par divers metu à travers le nez et les oreilles et conduit au cœur. De cet organe, partaient également les nombreux metu chargés de conduire l'air et le liquide aux diverses parties du corps. Les metu conduisaient également l'urine. En somme, les metu correspond dans sa conception anatomique et physiologique aux souffles des physiologues de la Grèce ancienne. Les metu étaient les éléments de base de santé et de vie. Le Papyrus Ebers met en avant les effets thérapeutiques qui résident dans l'élévation ou l'équilibrage des fonctions des metu. La libre circulation des metu était la recette de santé garantie par les Egyptiens d'autrefois. Les médecins de ce temps-là étaient convaincus que les déséquilibres du sang, de l'eau et du souffle étaient cause de pathologies. La convergence de cette idée entre l'Egypte ancienne, la Chine et l'Inde est très perturbante pour nos modernes, car cette connaissance remonte très loin dans la passé.

La recherche est loin d'être terminé, il reste énormément à faire néanmoins nous pouvons émettre plusieurs accointance entre le Prana et l'énergie vitale. La conscience, la respiration, le flux énergétique et la santé possède un lien intrinsèque entre eux ; l'intelligence, la chaleur du corps humain, l'élan vital et la circulation du flux pranique au sein de la psychophysique s'articulent selon un schéma où l'homme est relié au Cosmos et à tout son flux. Dans cette perspective, le fait qu'une personne puisse se nourrir du Prana rejoint d'antiques conceptions qui portaient un sens, alors qu'aujourd'hui la médecine qui isole l'homme de l'ensemble des influences cosmico-telluriques prête à sourire les spécialistes. Nous en concluons que la bataille se tient d'avantage dans une perception du monde et de l'homme qu'une véritable perception scientifique, la médecine se doit donc d'ouvrir son espace d'investigation afin de redonner force à sa propre position en tant qu'étude plénière du corps humain.

 

Sources :


Auteur: André Pichot

Titre: Expliquer la vie

Editions: Quae


Auteur: Daniel Shoushi

Titre: Emergence, Tome III

Editions: Orphélya


Auteur: Fritz-Albert Popp

Titre: Biologie de la lumière

Editions: Marco Pietteur


Auteur: Jacques de Vitry

Titre: Vie de Marie D'oignies

Editions: Actes Sud


Articles :


Auteur: Zhu Bing

Titre: La théorie des méridiens comporte-elle des éléments importés?


Auteur: André Padoux

Chapitre 5. Corps et cosmos : L’image du corps du yogin tantriqueIn : Images du corps dans le monde hindou [en ligne]. Paris : CNRS Éditions, 2003 (généré le 29 mars 2019).

Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/editionscnrs/9316>. ISBN :

9782271091086. DOI : 10.4000/books.editionscnrs.9316.


Site internet:

http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Textes/index.html


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